Photo: Frédéric Douard, Bioénergie International

La bioraffinerie Enerphyt réaffirme sa confiance dans le séchoir STELA

En 2016, le magazine Bioénergie International était allé à la découverte d’une entreprise jurassienne discrète et qui travaille à la pointe de l’évolution des matériaux biosourcés. Enerphyt est un établissement issu d’une lignée familiale multicentenaire de meuniers, celle des Sauvin de Patornay dans le Jura. L’entreprise raffine mécaniquement les biomasses lignocellulosiques comme le bois, le miscanthus ou le sarment de vigne, pour en faire de microéléments incorporables dans des matériaux en quête de bilan carbone plus neutre comme le béton, les céramiques, les plastiques ou les filtres à eau

Dix ans d’activité et une progression dans le sens de l’Histoire

Il y a dix ans, le marché des matières végétales pour la production de matériaux et produits manufacturés était déjà en nette progression par rapport à une situation où le végétal avait été, selon le secteur industriel, soit abandonné depuis des décennies, soit jamais sollicité. Enerphyt, qui en était encore à ses débuts, a donc suivi cette progression qui s’avère aujourd’hui pérenne. Elle compte passer d’une production de quelques milliers de tonnes de biomasse micronisée par an à son démarrage, à près de 45 000 tonnes par an à l’horizon 2030.

Un métier qui passe le bois du très gros au très petit

L’entreprise travaille les bois résineux locaux et le hêtre. Son approvisionnement se fait majoritairement en produits connexes de sciage : sciure et plaquettes pour les résineux, grumes et connexes pour le hêtre. L’entreprise dispose ainsi d’un stock permanent de 5 à 7000 tonnes de grumes, et qui est utilisé selon un roulement de 6 à 8 mois. En plus de servir de tampon entre besoins et approvisionnements saisonniers, ce stock, dans ce secteur du Haut-Jura où l’air est relativement sec, permet un pré-séchage du bois qui économise sur l’énergie de séchage à fournir.

Les grumes sont ensuite réduites en plaquettes par un prestataire, puis comme les matières déjà fractionnées, sont séchées à basse température avant l’opération ultime de micronisation. Cette transformation, précise au micromètre, se réalise dans des broyeurs affineurs ultrarapides, et doit obéir au cahier des charges de chaque client en termes de dimensions, de forme et d’accroche des particules, de taux de particules ultrafines, d’humidité… La précision de chaque tâche est donc ici quasiment horlogère et c’est dans ce but que le séchoir STELA avait été retenu, parmi l’ensemble des autres équipements nécessaires.

Une fois sèche et micronisée, la biomasse devenue pulvérulente est stockée dans une dizaine de silos verticaux et dédiés à des qualités bien définies. La livraison se fait majoritairement par citerne, mais aussi par big-bag ou sacs sur les marchés de petits volumes ou très éloignés. L’entreprise fournit par exemple actuellement des industriels italiens et britanniques en big-bags conteneurisés. Notons également que pour l’expédition en citerne de certaines farines peu denses, une granulation légère de la poudre permet de densifier les volumes transportés. Pour cela, Enerphyt a fait récemment l’acquisition d’une presse à granulés MTD d’une tonne/h.


Des premiers équipements qui ont fonctionné dix ans sans jamais s’arrêter 

À son démarrage, en 2014, l’entreprise a investi dans une chaudière biomasse Agro Forst de 1 MW, pour sécher ses matières premières dans un séchoir à bande STELA d’une tonne/h, des équipements fournis par les Ets VBI Bois, spécialisés dans la fourniture d’équipements pour les industries du bois, et installés à Barr en Alsace.

Avec la montée en puissance de la demande en matières premières biosourcées, en 2022, Valérian Sauvin, le fondateur et président d’Enerphyt, était parvenu à la limite de production possible avec sa première série d’équipements, soit 15 000 tonnes/an.

Se sont alors posées les questions du dimensionnement et de la fourniture des nouveaux équipements. Sur le dimensionnement, une nouvelle chaudière de 3,3 MW a été installée, et le nouveau séchoir a une capacité d’évaporation est de 2,7 MW. Sachant que les nouveaux équipements fonctionnent en addition des premiers, avec création d’une nouvelle chaufferie, et qu’il restait une réserve de capacité sur le premier séchoir, les deux chaufferies sont toutes deux interconnectées aux deux séchoirs, le tout garantissant une capacité de séchage de 4,3 MW. Les nouveaux équipements ont été installés et mis en service au premier semestre 2024, ce qui a été l’occasion d’arrêter, et pour la première fois depuis 10 ans, la chaudière de 1 MW et le premier séchoir !

Concernant le choix des fournisseurs des nouveaux équipements, Valérian est catégorique :

« comment changer de marque de chaudière ou de séchoir alors que les deux équipements qui nous avons mis en service il y a dix ans ont fonctionné à merveille non-stop depuis dix ans, H24, 7 J/7 ? ». Et il ajoute, « en dix ans, la chaudière nous a coûté 2 000 € de consommables, hors combustible et électricité bien entendu. Allumée en 2014, la chaudière a été entretenue à chaud, ventilateur d’extraction en marche forcée. Elle a fonctionné plus de 3 650 jours, soit près de 90 000 heures sans incident, sans usure majeure, avec de l’écorce humide et non broyée, mais toujours à puissance maximale. Lors de son arrêt cette année, nous avons pu confirmer également ce que nous voyions à chaud lors des entretiens, à savoir que la totalité des barreaux de grille est toujours en état de fonctionnement ! ». Et Valérian d’ajouter : « Concernant le premier séchoir, par précaution, nous avons décidé de changer le tapis alors que nous avions mis en service le deuxième séchoir, mais le fournisseur a signalé que ça n’aurait pas été nécessaire de la faire ! ».

Considérant les exceptionnels états de service de sa première chaudière Agro Forst et de son séchoir STELA, Valérian n’a donc pas hésité à revenir vers VBI pour sa deuxième tranche d’investissements.

Une stratégie de production bas carbone pour un matériau bas carbone

Pour Valérian, et pour son père Gilles qui l’accompagne toujours, ces nouveaux investissements ont également été l’occasion d’une réflexion sur l’autonomie électrique de cette entreprise électro-intensive. Avec un besoin permanent actuel de 500 kWé, et un besoin prévisionnel de 800 kWé à 2030, l’évolution haussière des prix de l’électricité est une question vitale. Donc pour un jour pouvoir autoproduire une grande partie de ses besoins électriques, Valérian a opté pour la mise en place, à moyen terme, d’un module de cogénération ORC. Il a donc demandé à Agro Forst de lui livrer une chaudière de 3,3 MW, aujourd’hui en eau chaude, mais dont l’échangeur pourra être interchangé avec un échangeur à huile thermique. Pour ce faire, le modèle livré possède un échangeur vertical, du même type que le futur qui utilisera de l’huile. La nouvelle chaudière est aussi d’ores et déjà équipée d’un économiseur. Pour le traitement des fumées, l’installation est dotée d’un électrofiltre. Et dans la nouvelle chaufferie, l’emplacement de l’ORC est déjà prévu. Il pourra produire 600 kWé, H24, juste en valorisant de l’écorce. Une fois cet investissement réalisé, le bilan carbone de la biomasse Enerphyt, entièrement collectée localement, se placera parmi les produits les mieux décarbonés du marché.

Crédits: Frédéric Douard, Bioénergie International